Atlantic slave trade Slave trade transatlantic history

Thomas Clarkson (1760-1846), militant abolitionniste

April 14, 2023

Françoise Le Jeune

Thomas Clarkson est un abolitionniste britannique qui organise la campagne contre la traite en Grande-Bretagne à la fin du 18e siècle. Il dédie sa vie à la cause abolitionniste, déployant de nombreux moyens pour y rallier le grand public et les parlementaires, en Grande-Bretagne, puis en France. Il est le premier à utiliser des images, des artefacts, des enquêtes et ses écrits humanistes, pour sensibiliser le public. Dès 1815, il s’engage également dans une croisade européenne, visant à convaincre les nations et les monarques, d’agir collectivement pour mettre un terme à la traite.

Clarkson, un abolitionniste en croisade

Thomas Clarkson est un abolitionniste britannique de l’ombre, qui consacre sa vie à la croisade contre la traite. Il est touché par une révélation divine, selon lui, lorsqu’étudiant en théologie, il est amené à rédiger une dissertation sur la servitude. Il est bouleversé par la lecture d’auteurs abolitionnistes (Bénézet, Wesley) qui dénoncent l’inhumanité de la traite et de l’esclavage. Clarkson décide de dédier sa vie à la cause de l’abolition, convaincu que la réalité des faits, la connaissance de la traite, amèneront les Britanniques et les Européens à réaliser que leurs nations sont engagées dans un trafic d’êtres humains.

Clarkson organise la Société pour l’abolition de la traite, à Londres, en 1787. Cette dernière soutient le parlementaire Wilberforce qui porte le discours abolitionniste à la Chambre des Communes. Les arguments de Clarkson sont basés sur des faits et des chiffres qu’il collecte dans les ports britanniques, auprès d’anciens marins, de capitaines de navire… Il faut rapporter leurs paroles car ils connaissent la cruauté de la traite. Clarkson donne des conférences dans les églises, à travers le Royaume-Uni, gagnant l’auditoire à la cause abolitionniste par des représentations de la traite. Des gravures et un bateau en coupe (The Brookes), représentant des corps entassés dans des cales contenant deux fois plus d’esclaves que le bateau ne peut en contenir, visent à choquer les députés et le grand public. Clarkson fait reproduire ces images perturbantes en de multiples exemplaires, et il publie de courts essais basés sur des faits, qu’il distribue lors de ses tournées. Il transporte avec lui une malle contenant divers objets utilisés dans la traite (fouet, fers…). Il les exhibe pour choquer l’auditoire et les amener à ressentir la douleur de l’esclave. Sa collecte d’informations et ses enquêtes lui permettent de convaincre le comité parlementaire en charge de la question de la traite, de faire une proposition de loi. Celle-ci est présentée par Wilberforce en avril 1791 et à de multiples reprises par la suite, jusqu’à l’abolition en 1807. À partir de cette date, et pendant une quinzaine d’années, Clarkson continue son travail de croisé, cherchant à convaincre les Européens que l’abolition de la traite doit être collective, dans l’intérêt de l’humanité.

En dépit de son âge avancé, au moment où la campagne contre l’esclavage commence en 1823 en Grande-Bretagne, il reprend le chemin des conférences, à la rencontre d’une nouvelle génération d’abolitionnistes, en produisant des textes synthétiques au ton humaniste, et en utilisant des images et des artefacts. Il créée un réseau de deux cents comités à travers le pays, à partir desquels s’organise la signature de pétitions contre l’esclavage qui est aboli en 1833.

Clarkson pour un abolitionisme européen

Thomas Clarkson est convaincu que seule une démarche internationale, associant la France et d’autres pays européens, permettra réellement de mettre un terme à la traite. Il se rend à Paris pour rencontrer les Amis des Noirs dès l’été 1789. Il apporte des chiffres, des images et des objets, pour convaincre ses interlocuteurs de l’intérêt d’entamer une campagne auprès du grand public. Il rentre même en contact avec Louis XVI qu’il aurait convaincu, selon lui, de l’intérêt d’arrêter la traite. Il échange également avec Vincent Ogé, le leader des députés libres de couleur. Il ne semble pas étonné d’apprendre qu’une première insurrection est menée à Saint Domingue par ce dernier, en octobre 1790. Clarkson prévient ses interlocuteurs français que la promesse des droits de l’homme ne peut rester sans effet immédiat dans les colonies sucrières, sauf en libérant progressivement les esclaves.

Après 1815, Clarkson milite dans l’ombre à Paris, puis au Congrès de Vienne, avec l’aval du gouvernement britannique, pour convaincre notamment l’empereur de Russie, touché par ses écrits et l’image du bateau en coupe, de faire avancer l’abolition européenne de la traite auprès des autres têtes couronnées, en punissant les contrevenants, français, espagnol et portugais d’acte de piraterie. Clarkson poursuit ses démarches aux congrès européens d’Aix-La-Chapelle (1818) et à celui de Vérone (1820) mais sa proposition pour une abolition collective et immédiate, reste lettre morte. À la même époque, il interagit aussi au nom d’Henri Christophe, le roi d’Haïti, qui s’appuie sur Clarkson pour l’aider dans son projet dit de « civilisation » qui vise à faire venir des missionnaires britanniques pour éduquer son peuple. Clarkson et l’African Institution, fondé en 1807 par les abolitionnistes britanniques pour soutenir entre autres le développement de la Sierra Léone, lui envoie quelques missionnaires et des outils agricoles. Christophe entend faire de Clarkson son ambassadeur en Europe pour négocier un traité de paix et de commerce avec la France. Clarkson interagit au mieux mais sans y parvenir jusqu’à la mort de Christophe en 1820.

 

 

 

Pour aller plus loin:

🔶 Présentation de Clarkson et d’objets lui ayant appartenus sur le site du  Wisbech and Fenland Museum. A consulter en ligne : ICI 

🔶Présentation du contenu de la malle de Clarkson sur un site pédagogique du British Museum : ICI 

🔶Courte vidéo sur la gravure abolitionniste du Plan du navire The Brookes, site Internet L’Histoire par l’image, à consulter en ligne : ICI 

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À propos de l’auteur

 

Françoise Le Jeune est professeur en histoire et civilisation nord-américaine et britannique à Nantes Université. Ses recherches sur l’empire britannique aux 18e-19e siècles, et sur l’espace atlantique des révolutions, s’inscrivent dans l’axe 1 du Centre de Recherche en Histoire Internationale et Atlantique (CRHIA).

Bibliographie

Carey Brycchan, British Abolitionism and the Rhetoric of Sensibility: Writing, Sentiment, and Slavery, 1760-1807, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2005.

Françoise Le Jeune, « Thomas Clarkson, ambassadeur et promoteur de la première campagne contre la traite (1787-1807) », dans Françoise Le Jeune et Michel Prum (dir.), Le débat sur l’abolition de l’esclavage en Grande-Bretagne (1787-1840), Paris, Ellipse, 2008.

Ellen Gibson Wilson, Thomas Clarkson, A Biography, Macmillan, London, 1989.

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